Faut-il légiférer sur la sexualité des médecins ?

Dans une pétition lancée à l’initiative du Dr Dominique Dupagne dans son forum sur : www.atoute.org, médecins et féministes réclament qu’une interdiction de toute relation sexuelle entre un médecin et ses patients soit inscrite dans le Code de déontologie médicale…Mais l’Ordre s’y refuse, estimant que l’arsenal juridique actuel est suffisant pour sanctionner les abus.

« Une victime livre quasiment le mode d’emploi à l’abuseur »

Des femmes racontent avoir été forcées à des relations sexuelles plus ou moins consenties, anxiogènes et toxiques avec leurs thérapeutes. Terriblement vulnérables, elles sont tombées entre les mains de psychiatres gynécologues ou médecins généralistes  abuseurs, qui ont su tirer tout le profit de leurs faiblesses.

« La psychiatrie est la plus grande pourvoyeuse de ce genre de situations, parce qu’une victime livre quasiment le mode d’emploi à l’abuseur, toute sa vulnérabilité, toutes ses failles. Cela devient tellement facile » développe le Dr Dupagne

Sur ce thème et sous le nom « Opération Serment d’Hippocrate »,  une pétition circule depuis lundi dernier sur le net, comportant déjà quelques signatures prestigieuses. « A chaque fois qu’il y a une relation émotionnelle très forte entre une victime et son médecin, la situation peut basculer » explique le Dr Dupagne. « Pour que le transfert amoureux s’installe (ou pas, car il peut y avoir carrément viol), il faut qu’il y ait une personne en situation de détresse et une autre, le médecin, en situation de sauveur, d’aidant« .

Ces médecins abuseurs sont très peu nombreux

Très peu de victimes portent plainte auprès de l’Ordre, une sur cent, environ. Et l’accueil qui leur est fait n’est souvent pas à la hauteur du traumatisme vécu, parfois pendant plusieurs années.

Les victimes doivent se justifier, répondre à un interrogatoire à charge, suspectées d’affabulation ou d’hystérie. Et, la plupart du temps, les peines infligées aux médecins sont légères eu égard à la gravité avérée des faits. On voit ici un simple avertissement délivré par le conseil de l’Ordre régional ou, comme dans le cas de Marie, six mois d’interdiction d’exercice pour le psychiatre qui l’a abusée durant des années dans une relation perverse et destructrice.

La finalité de cette démarche est la suivante : parvenir à l’inversion de la preuve alors qu’aujourd’hui, il appartient à la patiente victime, de témoigner devant l’Ordre des abus subis et à se justifier.  » Si l’article est intégré au Code de déontologie, le médecin devra expliquer pourquoi, il pense que c’est à bon droit qu’il a eu des relations sexuelles avec une patiente malgré l’interdiction. C’est l’inverse de la situation actuelle, »

« Rien n’interdit formellement dans le Code de déontologie médicale une relation sexuelle entre un médecin et ses patients rien non plus, dans la dernière version du serment d’Hippocrate. Certes, les psychanalystes ont intégré sans ambiguïté l’interdit sexuel dans leur code d’éthique, sans valeur réglementaire. « Et apparemment sans grand impact sur leurs pratiques, » relève le Dr Dupagne.

Ces médecins abuseurs (quasiment exclusivement des hommes) sont très peu nombreux. Leur argumentaire s’appuie sur la notion de relation sexuelle entre adultes consentants.

Pour l’Ordre, l’arsenal juridique est opérationnel 

Dans un long communiqué, l’Ordre rappelle que le droit français réprime le harcèlement et les abus sexuels. Et que nombre de comportements sexistes, inconduites et harcèlements à caractère sexuel de la part d’un médecin sont « contraires à l’éthique médicale et constituent une faute déontologique ».

Pour l’Ordre, l’arsenal juridique est opérationnel. Le code de déontologie affirme dans son article 2 que ‘ »le médecin, au service de l’individu et de la santé publique, exerce sa mission dans le respect de la vie humaine, de la personne et de sa dignité ». Dans un commentaire accompagnant le code, il est également précisé que « le médecin ne doit pas abuser de sa position notamment du fait de la vulnérabilité potentielle du patient et doit s’abstenir de tout comportement ambigu (regard, parole, geste, attitude, familiarité inadaptée), en particulier à connotation sexuelle ».

L’article 3 ajoute qu’un médecin doit « en toutes circonstances, respecter les principes de moralité, de probité et de dévouement indispensables à l’exercice de la médecine », l’article 7 rappelle que le médecin « ne doit jamais se départir d’une attitude correcte et attentive envers la personne examinée » enfin, l’article 31 affirme que « tout médecin doit s’abstenir à de tout acte de nature à déconsidérer (sa profession) ».

En conséquence, l’institution considère qu’une inscription dans le code de déontologie d’un article supplémentaire qui interdirait toute relation sexuelle, même librement consentie, entre un médecin et son patient, serait une « intrusion dans la vie privée de personnes libres et consentantes ». Dès lors que les textes applicables et appliqués permettent de réprimer en droit disciplinaire tous les abus de faiblesse sur personne en situation de vulnérabilité, y compris en matière sexuelle, aller plus loin « contreviendrait aux principes de la liberté des personnes, alors que la Convention européenne des Droits de l’Homme, en son article 8, établit que « Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance », conclut l’institution. Fin de non- recevoir, donc.

« Envoyer sa patiente à un confrère et de lui déclarer sa flamme ensuite »

« Rien n’empêche un soignant d’envoyer sa patiente à un confrère et de lui déclarer sa flamme ensuite. Nous ne sommes pas dans une position tout blanc ou tout noir », ajoute le Docteur Dupagne

Les signataires vont maintenant faire pression du côté de la ministre de la Santé « une femme, un médecin, qui a dû être témoin d’abus au long de sa carrière », pour qu’elle demande au Conseil d’Etat de réfléchir à cela, alors que l’Ordre reste frileux.

certains sur les réseaux sociaux s’insurgent contre les règlements qui envahissent la vie, la pudibonderie, le politiquement correct, la chasse aux sachants….

Dans le sillon de l’affaire Weinstein, du mouvement « balance ton porc » et d’une atmosphère de « doc bashing » assez nauséabonde, de la dénonciation du harcèlement sexuel à l’hôpital et des fresques en salle de garde , du bizutage et des tonus ce mouvement fait évidemment réagir certains sur les réseaux sociaux contre les règlements qui envahissent la vie, la pudibonderie, le politiquement correct, la chasse aux sachants….

Texte inspiré de l’article de Catherine le Borgne le 27-03-2018 sur Egora.fr

5 Commentaires

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  1. Cela dépends du secteur d’activité car si la patiente « c’est émue » il ne faut pas en profiter ! car là « c’est cul « rembourse tout !

  2. il y a 2 choses différentes à ne pas comparer
    soit le médecin est pervers et va abuser de son « pouvoir » pour pecho
    soit il peut se produire un coup de foudre entre le médecin et la patiente.

    le cul est un sujet sensible et ne dérivons pas vers une société où le simple fait de regarder une jolie femme peut te conduire en prison !

  3. Dupagne est souvent judicieux dans ses avis, mais là il pousse un peu loin le bouchon
    Le code déontologie est suffisamment précis , inutile dans rajouter une couche

    Ps : bravo Serge pour ton nouveau bandeau printanier

  4. On dérive vers un régime dictatorial !!!

  5. le plaisir des dieux est sacré

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